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Dimanche, nous sommes allés in extremis voir l’expo de Garutti au PAC et depuis, nous ne cessons de nous autocongratuler de notre présence d’esprit (si). De fait, elles ne sont pas si nombreuses, les expos qui nous interpellent et nous touchent, tout en étant jolies… Ne vous êtes-vous jamais demandé, devant une oeuvre, sur un mur, une place ou dans un musée, à qui elle était destinée? C’est cette modalité qu’interroge Alberto Garutti en accompagnant ses installations de dédicaces, à celui qui viendra, éprouvera, s’émouvra…

statue madone art contemporain

Ainsi les feuilles volantes tombant du toit sont-elle dédiées à celui qu regardera en l’air, les lumières fluctuantes d’une place aux nouveaux-nés de la maternité d’à coté, la musique d’un autre temps dans les rues à ceux qui ont pendant la guerre dansé dessus, une série de photo de lieux à ceux qui y sont tombés amoureux (storie d’amore, 2002)… Dans le même temps, des micros dans la salle enregistrent les conversations, qui seront retranscrites dans un livre, évidemment dédié aux visiteurs de ladite exposition…

dédicaces alberto garutti

Chaque installation en appelle à la notion de collectivité, de pensée comme de lieux, et aux infimes liens tissés entre les individus qui les ont partagés, fusse pour un fugace moment. Car quand des bobines de fil symbolyse les kilomètres séparant deux endroits, éloignés mais proche dans l’histoire d’une même personne (matasse, 1997/2004), une installation informatico-éléctrique illumine une série de lampes lorsque la foudre touche l’Italie, rapprochant du même coup tous ceux qui, à deux pas ou plus loin, croisent un orage sur leur chemin… (temporali, 2009)

dédicace alberto garutti

Mais quand on commence juste à croire que l’intérêt est hors de l’oeuvre, dans ces résonnances spatio-temporelles et événementielles, l’artiste nous interroge à nouveau et brouille les pistes, avec sa série de bancs phosphorescents qui ne s’illuminent que lorsque le dernier visiteur a quitté les lieux (che cosa succede nelle stanze quando gli uomini se ne vanno? que se passent-il dans les pièces quand les hommes s’en vont?). Une oeuvre en soi, ou qui n’existe que par ces regards manquants, ou par ceux, imaginaires, de qui, comme moi, à l’heure de la fermeture, y ont songé un instant?

Alberto Garutti – didascalia/caption – Padiglione d’arte contemporanea – Milano (photos: PAC 2012 ou l’exposition vue comme un paysage, Madonna 2007 ou l’expérience mistico-sensorielle d’une icone à 36,7°C, Didascalie 2012, didascalia 2012)